{3} Comment devient-on chamane ?
Comment devient-on chamane ?
Cette question que se posent les Occidentaux est souvent vide de sens pour les peuples d'Asie du Nord. En effet, selon le modèle dominant, on ne devient pas chamane, on naît chamane, habituellement par héritage.
le simple fait d'être en relation intime avec des esprits n'est jamais considéré comme une épreuve automatique d'aptitude chamanique .
En effet, les fous et les malades sont aussi habités par un esprit qui les a choisis. Le chamane se distingue par de ces cas par des qualités corporelles qui lui permettent de voir des esprits et font de lui un être ouvert par destin, à l'invisible.
Le développement d'un chamne de naissance suit un scénario typique. Il manifeste très tôt des signes inhabituels : il naît coiffé (avec la poche des eaux sur la tête), il présente des marques corporelles comme une tache de naissance, il est bouclé, ou bien il se retourne dans son berceau. Ces particularités sont interprétées comme des signes probables d'une nature individuelle singulière.
Dans l'enfance, il fait preuve de capacités hors de l'ordinaire : il perçoit des choses invisibles et devine l'avenir. A l'adolescence, il traverse une crise violente et douloureuse, il délire et fuit en forêt.
Il raconte avoir fait des rêves typiques. (...)
La personne identifiée comme chamane par sa famille grâce à ces signes commence ordinairement par refuser obstinément cette fonction. On invite alors un chamane expérimenté qui établit que, conformément aux intuitions de l'entourage, l'adolescent est bien doué d'une nature chamaaniwque et que les entités qui le tourment ne sont autres que ses ancêtres. Or il est imposible de rompre le lien héréditaire d'une personne avec ses ancêtres. Dès qu'il se soumet et accepte son destin , l'adolescent commence une brève formation à sa nouvelle fonction auprès du chamane invité. (...)
L'art de chamaniser s'obtient aussi en général par héritage. Le futur chamane le reçoit de son père , de sa mère ou d'un parent chamane, transmis généralement peu avant ou après la mort de celui-ci. En cas de transmission post mortem, l'esprit du défunt ou les esprits qui assistaient ce dernier initient alors l'élu à travers des rêves ou par un maladie. Mais si l'élu se refuse à embrasser cette fonction , les esprits ne cessent de le tourmenter.
Source : In " Le chamanisme de Sibérie et d'Asie centrale" par Charles Stépanoff et Thierry Zarcone - Découvertes Gallimard